USA-SierraLeone
Miguel Gil Moreno de Mora: un intrépide reporter-cameraman (PORTRAIT)
par Michel MOUTOT

NEW YORK, 25 mai (AFP) - Miguel Gil Moreno de Mora, 32 ans, tué mercredi dans une embuscade au Sierra Leone, était un intrépide reporter-cameraman d'AP-TV, passionné par la couverture des conflits et conscient de l'importance des images qu'il pouvait en rapporter.

Né à Barcelone dans une famille de la noblesse catalane, il obtient un diplôme d'avocat après une scolarité chez les pères jésuites. Entré en 1993 dans le prestigieux cabinet Felio Vilarrubias, il démissionne au bout d'un an pour suivre sa vocation: reporter de guerre.

Il arrive, sans le sou et sans connaitre personne, à Sarajevo en 1994. Pendant deux ans, il est pigiste pour le quotidien espagnol El Mundo et la chaine de radio Cadena Ser, et se fait rapidement remarquer par la qualité de ses reportages, sa gentillesse et son sens du contact.

Il passe à la caméra pour l'agence AP-TV, qui l'enverra sur la plupart des points chauds du globe: Irak, RD Congo, Ouganda, Sierra Leone, Libéria, Congo-Brazzaville, Rwanda, Burundi, Soudan.

Il estimait que sa mission la plus dangereuse avait été la Tchétchénie. "Là, le sentiment que tu peux mourir à n'importe quel moment ne te quittait jamais", racontait-il l'année dernière. Gil Moreno était célibataire.

En juin 1996, alors qu'il filmait l'arrivée de réfugiés serbes dans la ville de Mostar (sud de la Bosnie-Herzégovine), il est passé à tabac par des miliciens et laissé inconscient.

En mars 1999, au premier jour de l'offensive aérienne de l'OTAN contre l'armée yougoslave au Kosovo, Miguel Gil Moreno de Mora refuse de rejoindre le dernier convoi de journalistes quittant Pristina. Il se cachera dans la ville pendant trois semaines, ne la quittant qu'après avoir épuisé cassettes et batteries pour sa caméra.

Il rejoindra peu après les maquis des rebelles kosovars de l'UCK en Albanie, où il passera des semaines sous les bombardements serbes.

Il restera basé à Pristina pour APTN, né de la fusion d'APTV et WTN. La qualité des images qu'il rapportait, au prix de risques dont il assurait qu'ils étaient toujours calculés, lui a valu en 1998 le prix Rory Peck, distinction britannique qui récompense le meilleur cameraman de l'année. Il venait d'être désigné "cameraman de l'année" par la prestigieuse Royal Television society.

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